Et je dévore les lèvres (Tatiana Gerkens)

Et je dévore les lèvres des histoires interdites
je transgresse les lois des vivants
je lèche la plaie béante des nuits sacrilèges
la pierre aiguë du silence
l’écorce noire du désir

je m’offre ouverte et primitive au feu du langage

sans compromis
violente
brutale

heureuse au premier coup de griffes
de dents
au sang jailli

à la salive du rêve
tout contre le sexe blanc des étoiles

*

Je caresse ta tête de chien mort
ton ventre de paille sèche
ta peau d’arbre blessé
et puis tu vois je me couche
je tremble
dangereusement nue
les cendres des papillons noirs
entre mes mains de rien
l’équinoxe de leurs ailes
sur ta nuque de grève froide

j’y bois le goût du tranchant
l’odeur des plaines interdites
le galop de l’enfance
et je me coule dans tes plaies

ossature meurtrie

béance silencieuse

mon souffle lent
dans le désordre de ton sommeil

J’y force un cri

*

Le temps s’est tranché les veines
Les sangs ennemis se mélangent
Je t’aime et je meurs tout à la fois

Celle que je suis
Noire de cris
Sous des yeux de chat fantôme

Brûlée vive à chaque éclat de nuit

Qui le saura ?

Tatiana Gerkens