Le poème de la quinzaine / fin février 2018

Le moderne :

Pascal Boulanger, Extase

Trop de dieux
& de ciels vautrés sur la terre

Abraham & Ulysse
Abraham part sans retour

Le désert brûle-t-il
       la gorge
       le ventre
       le cœur
mieux que l’île natale ?

C’est la soif que j’aime ici
à Santa Maria della Vittoria
femme comblée & sainte
       par le dard en or

Il arrive que le chercheur trouve
la porte grande ouverte sur un dessin
qui l’enfante & l’enchante

Jardins miniatures
arbres nains
banc sous une rangée de tilleuls

L’univers dans la main
       quand il se détache
comme le fruit de la branche

L’écume sur la grande image.

Source

L’ancien :

Max Jacob, Aux pèlerins d’Emmaüs

Je ne sais qui était là : c’était l’un de ces bistros où ma jeunesse s’est évanouie. Une table de marbre blanc est l’endroit où la traditionnelle glace atteignait le coin du mur avant de continuer. Je portais un pauvre chapeau rond et ma figure interrogeait l’œil malade du Seigneur (c’était Lui ! Il ressemblait plutôt à Saint Jean-Baptiste, mais c’était bien Lui). « Puisque vous êtes Dieu et que vous savez tout, dites-moi quand finira cette guerre ! » et j’ajoutais « ...et qui sera le vainqueur ». Vous le dirai-je pour que vous alliez faire le prophète dans les salons ? Il se tut. Le soir tombait. Il n’y avait pas de boisson sur la table.

Source : Le cornet à dés, 1917

La trouvaille :

Albert Samain, Midi

Au zénith aveuglant brûle un globe de flamme,
Le ciel entier frémit criblé de flèches d’or.
Immobile et ridée à peine la mer dort,
La mer dort au soleil comme une belle femme.
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