Femme que la lumière et que la mer saluent
je salue dans ton corps le peuple de l’été,
je salue dans ton corps où la nuit m’a jeté
l’enfance qui commence et la lune qui mue.
Mère des corps vivants, Mère des corps nouveaux
je salue dans ton corps les corps transfigurés,
je salue dans ton corps tous les corps rassemblés
pour la force du feu et la force des eaux,
Femme de soleil blanc, Mère des pays frais
je salue dans ton sang, Femme que salue l’or,
tous les corps délivrés du sang et de la mort,
je salue dans ton sang le sel, l’huile et le lait.
Mère ressuscitée, ma mort qui devient vie
salue dans ton amour l’amour même du Père,
salue la terre en toi ouverte à la vraie terre
et la chair épousée et l’Église accomplie.
Mère miraculeuse, Ève renouvelée
je salue dans ton nom la naissance du monde,
je salue dans ton nom la mesure du monde
et la neige de Dieu sur les forêts brûlées.
Femme royale et forte, ô Femme dans le Christ
je salue dans ton corps la porte incantatoire,
je salue dans ton corps le mystère de gloire
que la chair connaîtra aux noces de l’Esprit !
Jean-Claude Renard, En une seule vigne, Le Seuil, 1959