Le livre prophétique - XXXVII (André Ibels)

Le Parc, au clair de lune agonisant, offert
Comme une Vierge chaste aux baisers de l’Époux,
Déploie en s’étalant et son torse et sa chair,
Rêvant l’étreinte blanche et nocturne à son cou ;

Les frais gazons tachés des soleils des Midis,
D’ombre fugace empreints et rouillés de lumières,
Suscitent, dans la nuit, les glaives de jadis
Sous le froid de l’Étoile aux menteuses crinières.

Et les Astres brûlés aux faces du miroir
Des Lacs, ont trembloté leur agonie ardente...
Ils ressusciteront dans la clarté des soirs
Pour qu’en nos yeux éteints l’essaim des astres, chante.

Des flots errants baignent les reflets des grands arbres,
Et des Vents, en caresses, ont jailli les brises
Rafraîchissant le geste et le profil des marbres
Épars au clair de lune en le parc qui se grise.

Un chœur de sources tinte au cristal de la roche,
Dans l’amphore qu’un dieu d’airain jette au bassin,
Et le Lac ébranlé recueille un chant de cloches
Qui va pieusement s’engloutir dans son sein.


André Ibels, Les Cités futures, 1895