Laissé pour les autres (Monique Laederach)

Nous avons laissé pour les autres
les pierres entassées
comme des temples ou
comme des tombeaux.
Et c'est ainsi que nous avons fermé
la maison de nos peurs :
la fenêtre barrée, le verrou sur la porte
et les vitres d'acier
(sur le toit le corbeau distendu dans ses loques,
triste signe ô le vent pour l'oblique vautour !)

Quelle fille fera du feu
dans un âtre où le feu n'est pas hôte ?
Elle porterait la braise
sous sa robe, pareille à sa peau jeune
et personne pour boire à genoux
le feu à côté d'elle ?


Monique Laederach, Si vivre est tel, L'Âge d'Homme, 1998