Mélancolie printanière (Hélène Picard)

Le soir sent la pluie et le mois de Mai,
Les fenêtres sont, autour de moi, closes.
Je n’ai pas d’espoir, pas d’or, pas de roses,
            Pas de Bien-aimé.

Je presse le pas vers quel but, quelle heure ?...
La longue avenue est pleine de vent,
Je bois l’atmosphère et je vais rêvant
            Vers quelle demeure ?...

Que l’air est léger, que mon’ cœur est lourd !...
Que la nuit est douce en son odeur verte !...
Je voudrais marcher, dans l’ombre déserte,
            Vers un peu d’amour...

Jeunesse et printemps, quelle solitude !...
J’évoque un jeune homme au front grave et las
Qui ferme, obsédé par tant de lilas,
            Ses livres d’étude...

J’évoque l’amour qui ne viendra pas,
Et pour m’enfoncer, avec plus d’ivresse,
Plus avant dans l’ombre et dans la tristesse
            Je presse le pas...


Hélène Picard, L’instant éternel, 1907