Vers d’airain pour Paul Adam (André Ibels)

Ô toi vers qui je tends mes amicales palmes,
Et le luth indompté d’une race qui sombre,
Écoule : j’ai jeté la Clef d’or dans l’eau calme,
Et j’ai suivi tes pas allégés de leurs ombres.

La Nef qui portera nos Races vers la grève,
— Où seuls, aborderont les Porteurs de lauriers, —
Parée ainsi qu’un glaive auguste de guerrier,
Passera sous l’Étoile, amoureuse d’un rêve.

Et tu couronneras l’avant rose des proues,
D’une Vierge vêtue avec les seules fleurs
Cueillies au pied des Croix où périrent des Coeurs.

Et je te baguerai de l’anneau merveilleux
Des claires Volontés qui gouvernent les roues.
Afin qu’heureusement tu conduises les dieux
Aux Terres de Beautés promises à leurs yeux.

Et nous jetterons l’ancre, ô Pilote sacré,
Malgré la mer hostile et les Tempêtes fortes,
Aux Chanaans, jaillis des rivages dorés,

Où nous saurons bâtir une Cité sans porte.


André Ibels, Les Cités futures, 1895