Sonnet lunaire (Gabrielle Basset d’Auriac)

Ce n’est pas de douleur c’est d’amour que je pleure.
André Suarès

Parmi les arbres tors et noirs aux branches nues,
La lune au halo clair écoutait dans la nuit
Doucement, sur le sol calme des avenues,
Tinter des gouttes d’eau, dans l’ombre, à petit bruit.

Et comme pleureraient des âmes méconnues
Devant l’effroi de l’heure et du temps qui s’enfuit,
Ainsi, chaque rameau, glacé d’un lourd ennui,
Laissait tomber ce soir des larmes continues...

Mais je vins... et voyant purs et silencieux,
Briller les pleurs qu’un mal profond met en mes yeux,
Les ramures soudain ont été consolées ;

La lune, qui connaît chacun de nos secrets,
De son plus doux rayon a bu tous les regrets
Et c’était comme un soleil bleu dans les allées...


Gabrielle Basset d’Auriac, décembre 1910 (Le sablier d’or, 1911)