Je suis la hanteuse (Lucie Delarue-Mardrus)

Je suis la hanteuse des mers fatales
Où s’échevèlent les couchers sanglants,
Des mers basses ou hautes ou étales
Vers qui je crie du profond de mes flancs.

Ma solitude orageuse s’y mêle
Au désert du sable vierge de pas
Et où, sans craindre d’oreille, je hèle
Je ne sais quel être qui ne vient pas...

Oh, la mer ! la mer ! Toi qui es une âme,
Sois bonne à cette triste au manteau noir,
Et de toute ta voix qui s’enfle et clame,
Hurle ta berceuse à son désespoir !


Lucie Delarue-Mardrus, Occident, Éditions de la Revue Blanche, 1901