Quand Jésus, expirant au milieu des ténèbres,
Eut, par trois fois, au ciel jeté ces cris funèbres
Dont tressaillit le Golgotha ;
Quand les femmes longtemps de
pleurs et d’aromate
Eurent baigné ses pieds, vint
Joseph l’Arimathe,
Qui prit le corps et l’emporta.
Alors, dans un sépulcre, — ô spectacle qui
navre ! —
Tout sanglant et meurtri l’on coucha le
cadavre
Enveloppé d’un blanc linceul.
Chacun vint à
son tour lui baiser la paupière ;
Et puis l’on
entendit retomber une pierre ;
Puis il fallut le laisser seul.
Mais le sabbat passé, quand la troisième aurore
Eut
paru, désirant de le revoir encore,
Marthe, Marie et Salomé,
D’un flambeau filial
guidant leurs pas dans l’ombre,
Toutes trois s’avançaient
vers le sépulcre sombre
Où dormait Jésus embaumé.
Or, voici que soudain, détaché de la tombe
Qu’il
scellait, le bloc glisse et devant elles tombe
Avec un long gémissement :
Aux froids degrés
assis et le front ceint d’étoiles
Deux anges ont
brillé, si muets sous leurs voiles
Qu’ils semblent en ravissement.
Les trois femmes tremblaient d’avancer sous le porche,
En
voyant dans leurs mains la lueur de la torche
Pâlir devant tant de clarté.
L’un des anges
alors, se voilant de ses ailes :
« Ne craignez rien,
dit-il, vous, ses filles fidèles :
Sachez qu’il est ressuscité. »
Et son doigt leur montrait l’Orient plein de flammes.
L’autre ange, tout en pleurs, se taisait. Les trois
femmes
Songèrent à s’en revenir :
Car leur cœur
n’avait plus qu’une douce souffrance,
De ces deux
visions l’une était l’Espérance,
Mais l’autre avait nom : Souvenir.
Charles Séguy-Villevaleix (1835-1923)